Le GR 20 en Corse
|Ajoutée bien après que j’eus commencé le GR 5 à Nice, cette section s’imposait si je voulais vraiment traverser complètement la France du sud au nord. Du fait de la durée du transport, la Corse n’est pas vraiment une destination qui s’improvise (j’avais une fois échoué à la rejoindre lors de vacances de Pâques, tous les ferries étant complets). Mais pendant deux années successives, des amis ayant loué une maison pour le mois d’août me proposaient de les rejoindre. C’était une excellente occasion d’essayer le GR20.
De façon pas très rationnelle, le GR 20 est mythique. Quand lors d’une rencontre sur les sentiers je signale que je randonne vraiment beaucoup, je récupère le plus souvent la réponse « Ah, est-ce que vous avez fait le GR20? »
À quoi ressemble-t-il donc, ce GR 20 ? Il ne m’a pas paru plus dur que la plupart des sentiers de montagne que j’ai pu essayer : les passages sur éboulis y restent très ponctuels, le balisage est excellent voire agressif. Bien sûr j’ai soigneusement évité les difficultés d’ordre météorologique -mais elles peuvent aussi perturber une marche dans les Alpes ou les Pyrénées. Ce qui fait une orignalité de ce sentier, sur certaines sections (en gros les plus hautes), c’est que le chemin est très irrégulier, en fait bien souvent ce n’est pas un chemin mais simplement un balisage qui guide la progression sur les rochers. De ce fait, il faut, même si c’est paradoxal, s’attendre à marcher plus lentement qu’on ne s’y attend. Une autre caractéristique est la nécessité d’emporter une grosse masse de nourriture, mais c’est de moins en moins vrai : des restaurants plus ou moins officiels se sont intercalés entre les officiels, et à ce que j’ai pu lire, à la date où j’écris mes lignes (en 2002) certains refuges vendent désormais des denrées alimentaires, ce qui n’était pas le cas au siècle dernier.
L’autre point à signaler concernant le GR 20, c’est qu’il y a beaucoup de monde, en fait trop de monde. De plus, comme le camping sauvage est interdit, tout le monde doit passer la nuit au même endroit et de ce fait, à la petite modulation qu’apporte la différence des vitesses de marche, tout le monde marche en un gros groupe toute la journée. C’est en particulier pour cela que je recommanderais de suivre le sentier du sud vers le nord : comme c’est de loin le sens le moins pratiqué, on croise bien sûr les foules marchant dans l’autre sens, mais on bénéficie tout de même d’heures plus calmes.
Notez aussi que le paysage est réputé moins spectaculaire au sud qu’au nord. C’est vrai, et sans doute même plus vrai que je ne m’y attendais : certains segments de la moitié sud sont en fait assez ordinaire (je ne parle pas là du plateau de Coscione, qui est lui paradisiaque) tandis qu’au nord de Vizzavona, presque tout est assez invraisemblable.
Comme je tenais à marcher de la mer à la mer, ma traversée de la Corse contient un peu plus que le GR 20 (un peu moins aussi, puisqu’il manque le segment Conca-Bavella) : un morceau du paisible Mare a Mare sud, et de la marche à la campagne, essentiellement sur routes : mes premiers essais m’ont vite fait comprendre qu’il n’est guère possible de traverser le maquis s’il n’y a pas une route ou au moins un sentier entretenu -et il ne semble plus en rester beaucoup, de ces sentiers, qui ne soient pas envahis par les broussailles. Mais route ou pas, les villages sont magnifiques et les habitants cordiaux comme en Italie. Enfin la marche côtière au sud-est de l’île, pas toujours facile à mener, s’est révélé un point fort de cette traversée.